Emmanuel Macron
Le président par intérim Emmanuel Macron est le favori pour remporter les premier et deuxième tours des élections et obtenir un second mandat de cinq ans. Il a survécu aux deux crises majeures de son mandat : les manifestations du « gilet jaune » et la pandémie. Il a également bénéficié de la guerre en Ukraine et de l'effet « rassemblement autour du drapeau », avec un pourcentage de voix allant jusqu'à 30 %.
Le 44e président a fait campagne sur l'égalité des sexes, l'intégration européenne et son solide bilan en matière d'emploi. Cependant, la hausse du coût de la vie, le récent scandale de la société de conseil McKinsey et son refus de participer aux débats télévisés avec d'autres candidats n'aideront pas son image de « présidente des riches » lointaine et élitiste.
Malgré une forte baisse dans les derniers sondages, Macron reste populaire auprès des seniors et des classes moyennes, deux groupes auxquels on peut faire confiance pour voter même si une faible participation est attendue.
Marine Le Pen
Candidate à l'extrême droite depuis 2012, Marine Le Pen est la favorite pour affronter le président Macron au second tour, comme elle l'avait fait en 2017. S'éloignant de l'agenda traditionnel de l'extrême droite et adoucissant sa position eurosceptique, elle a fait campagne avec sagesse sur les questions économiques et la question populaire du coût de la vie, obtenant un solide soutien de la classe ouvrière.
Ses propositions incluent la réduction de la TVA et la suppression de l'impôt sur le revenu pour les moins de 30 ans, ainsi qu'un référendum sur l'immigration.
L'ancienne image de Le Pen d'un leader coriace et incompétent a été remplacée par une figure plus douce et plus sereine. Il a tenu tête au défi d'Eric Zemmour, même lorsque des membres clés de son parti et même sa nièce (Marion Maréchal Le Pen) l'ont quitté pour le soutenir. La question clé est maintenant de savoir si cette nouvelle image suffira à rejeter un défi venu de l'extrême gauche et à atteindre à nouveau le second tour.
Jean-Luc Melenchon
L'homme qui inquiète Le Pen dans sa tentative d'affronter Macron est actuellement Jean-Luc Mélenchon. Le candidat du parti de gauche radicale La France Insoumise profite d'une vague grâce à une campagne forte, et parfois innovante. Mélenchon a grimpé dans les sondages pour devenir l'outsider le plus fort. Ses solides compétences oratoires, sa cohérence et le manque de compétence à gauche lui ont permis de se positionner comme la seule option crédible de gauche.
Ce militant vétéran de 70 ans propose un programme post-keynésien qui implique une augmentation des dépenses publiques et met l'accent sur les politiques environnementales.
Mélenchon veut être considéré comme la voix des banlieues défavorisées et des minorités ethniques. Et en tant que grand débatteur, cela représentera un défi majeur pour Macron s'il atteint le débat télévisé qui a traditionnellement lieu après le premier tour.
Cependant, les faiblesses de Mélenchon - notamment sa position ambiguë sur ce qu'il faut faire de Vladimir Poutine et de la guerre en Ukraine et de son agenda économique radical - ont le potentiel de s'aliéner les électeurs modérés.
Éric Zemmour
Le journaliste d'extrême droite controversé Éric Zemmour a fait sensation au début de la campagne. Se présentant comme le français Donald Trump, il a surpris tout le monde en obtenant 18% des voix et a semblé qualifié pour le second tour.
Zemmour a attiré des foules impressionnantes à ses rassemblements et a même réussi à créer un nouveau parti politique à succès. Mais le projet de Zemmour s'est rapidement défait grâce à la confusion et à la controverse entourant sa position sur des questions comme l'immigration, le genre et la guerre en Ukraine. Malgré cela, Zemmour et ses partisans affirment qu'il est toujours le candidat à suivre le 8 avril.
Valérie Pécresse
Valérie Pécresse, la candidate conservatrice des Républicains (parti de l'ancien président Nicolas Sarkozy) est la grande déception de cette campagne. Après avoir remporté de façon inattendue le vote pour devenir la candidate des Républicains, à un moment donné, il a semblé qu'elle pouvait passer au second tour.
Cependant, en raison d'une campagne peu brillante, de l'absence de soutien de Sarkozy et d'un rassemblement public particulièrement catastrophique, il n'a cessé de tomber dans les sondages. Pécresse a désormais peu de chances de remporter plus de 10% des voix, ce qui la laisse clairement derrière les autres grandes prétendantes.
... Et tout le monde
À côté des candidats qui ont une chance, il y en a une multitude d'autres qui n'en ont pas. Yannick Jadot, le candidat des Verts, est trop loin des meilleurs candidats pour prétendre à une place au second tour. Les partis verts obtiennent de bons résultats aux élections locales en France, mais rencontrent traditionnellement des difficultés lors des votes présidentiels et 2022 ne fera pas exception, malgré les défis environnementaux mondiaux.
Six autres candidats sont actuellement en dessous de 5 % dans les sondages. Fabien Roussel, le candidat communiste, a lancé une campagne joyeuse et positive, notamment en défendant le patrimoine gastronomique français. On estime qu'il obtiendra entre 3 et 5 % des voix.
Nicolas Dupont-Aignan, le candidat eurosceptique à droite, va tenter de capitaliser sur sa forte opposition à la politique du gouvernement en matière de COVID. Jean Lassalle, le député iconoclaste des Pyrénées, apparu en 2017, affirme être la voix de la « France authentique » et de la campagne. Il se contentera d'obtenir 3 % des voix.
La socialiste Anne Hidalgo est la candidate choc de ces élections. C'est la quintessence du déclin de l'ancien Parti socialiste au pouvoir, et son bilan de maire technocratique de Paris - où on lui reproche d'avoir augmenté la criminalité, la saleté et les embouteillages - ne l'a pas aidée. Enfin, l'extrême gauche sera représentée par deux candidats : Philippe Poutou et Nathalie Arthaud. On estime que les deux n'obtiendront que 1 % des voix.
Cette campagne a provoqué des frustrations, notamment en raison de l'absence de débats appropriés. Et on s'attend depuis longtemps à un faible taux de participation. Mais il reste un concours important qui montre à quel point le paysage politique français est en train de changer et de se fragmenter, entraînant la disparition des deux grands partis traditionnels. Les forces radicales se développent à la fois à gauche et à droite, tandis que le centre est désormais essentiel. Bon nombre des personnalités à l'origine de ces changements, comme Macron, Mélenchon et Le Pen, ne reviendront peut-être pas la prochaine fois. Et si la victoire de Macron semblait inévitable, des surprises sont encore possibles.
Par Laurent Binet Professeur, École des langues modernes, Université de Newcastle
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